Comme le dit la célèbre chanson française, « je vais vous parler d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître »... un temps qui est celui de notre enfance à Noyen et plus particulièrement d'un événement qui troublait la tranquillité habituelle du village chaque année en fin d'été : la fête patronale du 15 août.
En effet, Marie est la sainte patronne de Noyen et est fêtée le jour du 15 août ; donc comme toutes les communes de France, notre village avait sa fête patronale, très attendue car elle était l'occasion d'une fête foraine, très modeste mais très appréciée car les distractions étaient peu nombreuses à cette époque.
Les forains arrivaient donc quelques jours avant et s'installaient sur la place du bourg : point de caravanes comme maintenant mais des roulottes aux couleurs vives qui égayaient tout d'un coup notre paysage familier. Nous connaissions très bien ces gens qui année après année revenaient à Noyen : il s'agissait de la famille Someville, originaire de la Marne. Ils arrivaient avec 2 ou 3 camions tirant chacun au moins 2 remorques. Commençait alors l'installation des baraquements, jeux et manèges.
Ce qui nous intéressait plus particulièrement, nous les enfants était l'installation du manège de chevaux de bois : le cœur en était une grosse remorque dans laquelle trônait une énorme machinerie et qui était placée au milieu de la place près du calvaire. Et petit à petit, les forains installaient le plancher, le toit, les animaux de bois, chevaux, cochons, éléphants, certains fixes et d'autres mobiles sur de longues tiges verticales couleur or qui leur permettaient de monter et descendre ... et devant nos yeux émerveillés se dressait alors petit à petit un magnifique carrousel coloré, promesse d'un bonheur prochain.
Les forains installaient par ailleurs, un baraquement de tir à la carabine et tout à côté, barrant la rue du Bac, des balançoires « sabot » de couleur rouge et blanche.
Il y avait aussi bien entendu, une roulotte confiserie tenue par Mme Someville mère qui vendait des nougats, pralines et autres bonbons. Cette « confiserie » était adossée à la rotonde de bal située entre la rue Grande et la rue de l'Eglise car, bien évidemment, il y avait un bal populaire.
Tout le temps que durait cette installation, tous les enfants du village ne quittaient pas la place, nouveau terrain de jeux qui changeait des lieux habituels qui commençaient en fin de vacances d'été à perdre de leur intérêt.
Et le jour tant attendu arrivait enfin : tout Noyen convergeait vers la place et se retrouvait dans la joie et la bonne humeur, les 2 « café » de la place installaient même quelques tables à l'extérieur pour désaltérer les clients. Le manège de chevaux de bois ne désemplissait pas car même les adultes y grimpaient avec joie, et de même pour les balançoires dont les 2 occupants cherchaient à atteindre le maximum de hauteur.
Les mamans achetaient des confiseries, surtout du nougat de Montélimar, tendre ou dur suivant les goûts et recommandaient à leur progéniture de faire attention aux guêpes, tentées elles aussi par le sucre. Les claquements secs des carabines résonnaient du côté de la baraque de tir et les plus adroits gagnaient des peluches.
La fête avait donc lieu le jour du 15 août mais aussi le dimanche qui précédait et ces 2 journées étaient l'évènement qui marquait les vacances d'été car peu de Noyennais avaient l'occasion de quitter le village pour visiter d'autres lieux et connaître d'autres joies.
Si l'installation avait duré plusieurs jours, le démontage quant à lui se faisait en une nuit car les forains se rendaient à Marnay pour la fête qui avait lieu le dimanche suivant le 15 août et nous autres les enfants, nous nous sentions très tristes de découvrir au matin cette grande place vide et silencieuse. De plus, nous savions que la fête passée, nous allions irrémédiablement vers la fin des vacances et la reprise de l'école.